J’avais rencontré Lydia dans un drugstore du coin de ma rue
où je venais chercher les dernières nouveautés de bandes dessinées, en roman
graphique, ou quelques classiques en DVD que j’avais commandé le mois
précédent.
On échangea quelques mots devant un Hugo Pratt en lutrin et
on se plut tout de suite. Son sourire d’ange se fendit encore plus quand on se surprit
à préférer un grand Woody Allen de 2011 « Minuit à Paris », et je l’invitais
illico à prendre un verre chez moi pour lui montrer ma collection d’estampes.
La montée d’escalier vers mon appartement ne fut qu’un
florilège de coïncidences culturelles liant nos intellects, nos préférences convergeant
avec trouble vers tous nos auteurs favoris dans de nombreux domaines. Nous fêtâmes
comme une évidence ces rapprochements vers d’autres plus intimes, où nos
animalités rejoignirent dans la jouissance parfaite la quasi-totalité de nos
goûts.
Ceci nous donna envie de les partager plus encore et rapidement
nous regroupâmes nos vies et nos collections en une osmose parfaite, comme
notre amour. Ce fut un havre de bonheur partagé et le champ commun de notre bon
goût, connaissant comme une apogée telle l’apnée de nos esprits en ébullition.
Une fois pourtant, une divergence sur un auteur du XIXème
siècle, nous sentîmes les affres de la trahison et de la mésentente. Mais la
réconciliation horizontale qui s’ensuivit fut telle, qu’on eut l’impression d’un
orgasme au zénith et permanent. Ce qui provoqua un priapisme que je prenais
comme un cadeau de dieu et la preuve vivante d’un amour éternel pour
Lydia.
Mais ceci présageait d’autres discordes, certes légères-une
opposition Ford/Hitchcock au sujet d’un plan- mais comme l’annonce d’un déclin
qui n’était point américain et qui empira. Je retournais parfois seul à mon
drugstore au coin de la rue que je fréquentais jadis et c’est là que je
rencontrais Ester.
Je remarquais la dernière nouveauté en comics entre ses
doigts comme le signe du destin, et je fus charmé par un sourire que je
reconnaissais bien…
Jack Rackham.
Photo : Meryl Streep et Jeremy Irons, dans La Maîtresse du Ldt Français.